Changer de cap

Dans les conditions actuelles, le Canada n'est pas en voie d'atteindre son objectif de carboneutralité d'ici le milieu du siècle.

Malgré les politiques climatiques mises en place par le gouvernement fédéral depuis 2015 et les évaluations optimistes du Plan de réduction des émissions du Canada pour 2030, un rapport récent d'Environnement et changement climatique Canada (ECCC) a reconnu qu'il subsiste un écart important entre les réductions prévues dans le cadre des politiques climatiques existantes et les objectifs intermédiaires officiels pour 2030 et 2035. Ces conclusions concordent avec une évaluation antérieure de l'Institut de l'énergie Trottier dans ses Perspectives énergétiques canadiennes. ECCC prévoit désormais une réduction des GES de 18% au lieu de 40% pour 2030, et de 20% au lieu des 50% visés pour 2035, une projection qui ne tient pas compte de l'impact de l'abrogation de la taxe sur le carbone imposée aux consommateurs. Selon ECCC, l'adoption et la mise en œuvre complète de toutes les autres mesures envisagées par le gouvernement (appelées "mesures supplémentaires") pourraient combler partiellement cet écart en permettant une réduction de 30% des GES d'ici 2030 et de 35% d'ici 2035.

Sans mesures additionnelles significatives, le pays atteindrait donc moins de la moitié des réductions visées. Compte tenu de la conjoncture politique difficile, avec les turbulences liées aux droits de douane, l'hostilité de l'administration américaine actuelle à l'égard de la transition énergétique et du régime climatique international (ainsi que de mauvais résultats du gouvernement canadien en matière de prévision précise des trajectoires d'émissions futures), même ces résultats sont loin d'être certains. Pendant ce temps, de nombreux pays de l'OCDE ont réussi à réaliser des progrès significatifs. Ainsi, contrairement au Canada, les pays européens ont considérablement réduit leurs émissions depuis 1990. En effet, même si chaque pays est confronté à des défis et à des conditions qui lui sont propres, un grand nombre d'États ont réussi à mettre en œuvre des stratégies permettant de réduire considérablement leurs émissions, conformément aux objectifs de l'Accord de Paris. L’échec du Canada n'est pas seulement environnemental : nous ne progressons pas assez rapidement pour bâtir la nouvelle économie qui sera nécessaire pour assurer sa prospérité dans la seconde moitié du siècle.

Dans le présent rapport, nous réexaminons le défi de décarboner l'économie canadienne d'ici le milieu du siècle, nous examinons les progrès réalisés à ce jour et nous présentons les mesures qui peuvent réorienter les efforts afin de progresser dans les secteurs économiques clés.